Jacques MONORY né en 1934
Meurtre n° 10/2
(Les Meurtres)
1968
Huile sur toile et miroir brisé avec impacts de balles
160 x 400 cm
Après un passage par l’abstraction, Jacques
Monory introduit la figure dans sa peinture en 1962. Ses recherches
sont alors marquées par l’influence du pop art (de James Rosenquist en
particulier), dont l’irruption en Europe accélère un mouvement général
de retour à la figuration. En 1964, il participe, avec les artistes de
la Figuration narrative, à l’exposition « Mythologies quotidiennes »
organisée au musée d’Art moderne de la Ville de Paris. Monory travaille à
partir d’images photographiques, souvent prises par lui-même ou
découpées dans des magazines. Il utilise un appareil de projection qui
les agrandit à la mesure du tableau, opérant ainsi une sorte de mise au
carreau. Cette démarche signale les rapports multiples et complexes que
Monory entretient avec les images mécanisées (photographie, cinéma,
télévision). La toile est préalablement recouverte d’une couleur
monochrome, qui renforce la contradiction entre impression de réalité et
sentiment de basculement du réel. Meurtre n° 10/2 appartient à une série de vingt-deux œuvres commencée en 1968, moment où il tourne son premier film, Ex-.
Un photogramme de ce film va servir de point de départ au tableau où le
peintre se représente en meurtrier solitaire quittant les lieux du
crime. L’artiste apparaît régulièrement dans ses œuvres, tour à tour
héros, tueur à gages, victime ou simple témoin. Avec Meurtre n° 10/2,
la toile fonctionne comme un écran cinématographique où se projette le
drame et où, simultanément, le spectateur, comme pris au piège, se
reflète dans un miroir criblé d’impacts de balles, inséré dans la
composition. Tel un photogramme « gelé » où se mêlent dimensions réelles
et fictives, la peinture permet à Monory de condenser le temps et de
concilier en un même lieu des espaces hétérogènes.